L’attention est une capacité très sensible pour tous. Elle l’est d’autant plus chez les enfants touchés par une dyslexie, une dysphasie, une dyspraxie ou un déficit d’attention (TDAH). C’est également une habilité qui peut être entravée chez les Enfants Intellectuellement Précoces (EIP, Haut Potentiel).
Le cerveau va filtrer constamment ce qui lui semble important et ce qui ne l’est pas. C’est le rôle de notre système attentionnel. Les informations nous arrivent en rafale et nous devons en sélectionner certaines. L’attention est sensible à la valeur que l’on accorde à certaines choses. Notre cerveau nous envoie, suivant différentes zones, différentes valeurs, autrement dit notre cerveau gère le fait de recevoir de différentes zones différents messages qui sont estimés comme important. Certains de ces messages sont même parfois contradictoires. Exemple : répondre au message reçu par la tante Agathe et le fait de finir ses devoirs. C’est cette contradiction qui nous rend distraits.
L’attention : qu’est-ce que c’est ?
L’attention nous permet d’avoir un traitement actif des informations que nous percevons. Par exemple, ce que nous entendons ou ce que nous lisons. Nous percevons bien, mais les informations perçues ne pénètrent pas en nous. Nous avons tous fait cette expérience de lire un texte ou d’écouter parler quelqu’un en étant fatigué. Nous avons bien vu les mots, nous avons bien entendu, mais la fatigue a coupé notre attention et nous avons perdu le sens de ce que nous avons lu ou entendu.
Comme l’attention est sensible à la valeur que l’on accorde à certaines choses, nous allons donc privilégier certaines actions en fonction de notre choix attentionnel. Cette action sera donc adaptée à notre objectif intrinsèque. Notre action est donc liée à ce que nous avons initialement perçu. Il est donc utile de favoriser sélection de ces informations pour que nous portions notre attention sur ce qui doit être, par exemple, vu.
Les éléments qui favorisent notre attention
L’habitude :
Les routines que nous avons mises en place nous poussent à agir. Ces routines, ces habitudes ne sont que très peu coûteuses en matière d’attention. Pour les réaliser, nous avons mis en place des automatismes. Toute action que nous avons automatisée n’est plus soumise à un contrôle attentionnel.
En effet, fonctions exécutives et attention sont intimement liées. Les fonctions exécutives correspondent aux capacités nécessaires à une personne pour s’adapter à des situations nouvelles, c’est-à-dire non routinières, pour lesquelles il n’y a pas de solution toute faite. Néanmoins, nous sommes tous sujet à des situations non routinières, des situations pour lesquelles nous n’avons pas mis en place d’automatisme. Ces situations vont faire appel à nos fonctions exécutives, car elles demandent l’élaboration d’un plan pour réaliser la tâche.
Vous êtes en train de lire et d’un seul coup votre attention est automatiquement attirée par le carré rouge de cette image.
Mais ces mêmes habitudes peuvent aussi nous jouer des tours. En effet, lorsque je suis au téléphone et que j’ai un crayon sous la main, mon cerveau me proposant constamment des actions à réaliser, je vais, machinalement, me mettre griffonner sur un papier. Quand certaines choses se passent autour de nous, dans notre environnement, nous avons mis en place, par habitude des réponses toutes prêtes.
Quand il y a un dysfonctionnement au niveau attention, comme c’est le cas chez les personnes touchées par un Trouble Déficitaire de l’Attention avec ou sans Hyperactivité (TDAH), les actions proposées par notre cerveau sont automatiquement mises en place et il n’y a pas cette barrière qui permet de faire cesser l’action mise en place. Cette barrière est normalement placée par nos fonctions exécutives et fait appel à notre système d’inhibition. Chez eux, la partie frontale de leur cerveau dysfonctionnant, cette inhibition ne se met pas en place et ils persévèrent dans leur action. Dans le quotidien, c’est un enfant qui va répéter plusieurs fois la même action ou la même phrase.
Le système limbique
Le système limbique fait appel à notre cerveau émotionnel. Il classe en j’aime / je n’aime pas. Les émotions jouent un rôle important dans l’attention (comme dans la mémorisation et la prise de décision). Dans ce système limbique, il y a entre autres, l’hippocampe (pas le cheval de mer, mais une partie du cerveau qui se situe dans le lobe temporal) serait impliqué dans le processus de rappel et donc dans notre mémorisation. Il intervient également dans le système de récompense. Le système de récompense contribue aux sensations de plaisir et de satisfaction.
Quand nous sommes face à un événement nouveau, il envoie un signal d’incertitude afin de provoquer un lien entre cet événement nouveau et les événements déjà vécus. C’est ce signal, qui par les voies dopaminergiques[1], influencerait la motivation (et exploration) alors que l’hippocampe dirigerait l’attention vers la conséquence du fait prévu. On pense alors qu’il favorise la rationalisation[2] de nos incertitudes. Il permettrait un processus de feed-back[3]. En effet, en faisant un lien entre la cause et en déduisant la possible conséquence, il utiliserait une sorte de classification des probabilités sur l’événement futur. C’est donc bien dans un contexte d’incertitude qui nous invite à rationaliser.
C’est grâce à lui que même des années plus tard, nous nous rappelons que le réveillon chez Pierre et Lucie avait été un moment très agréable et que nous sommes contents de repasser un réveillon avec eux cette année. C’est aussi grâce à lui qu’en entendant « Still love in you » de Scorpion, vous vous ressentez une émotion si agréable et que vous souvenez du baiser que vous aviez échangé avec Stéphane à 15 ans.
Votre cerveau a donc fait des associations entre des objets, des situations, des goûts, des odeurs… et l’émotion ressentie. À partir de cette émotion, il fait donc ce classement binaire : j’aime / je n’aime pas. Mon attention va donc se porter particulièrement sur ce que j’aime.
Mais, ces associations réalisées par l’hippocampe vont venir augmenter la sensibilité émotionnelle. C’est un phénomène que l’on retrouve notamment chez les Enfants Intellectuellement Précoces (Haut Potentiel). On parle même d’’hypersensibilité émotionnelle. Avec le rôle de l’hippocampe, on comprend mieux pourquoi par moments, il leur est si difficile de porter une attention de bonne qualité alors qu’à d’autres, ils sont capables d’une excellente attention.
L’objectif
Pas n’importe quel objectif, celui que j’ai moi en tête. L’objectif que je me suis fixé.
C’est encore une fois lié au rôle de mon système exécutif. Je vais donc mettre mon attention sur l’objectif que je me suis fixé au moment où je me le suis fixé. Les autres éléments de mon environnement ne viennent pas me distraire de cet objectif. Il faut donc que je mette de côté les informations non intéressantes pour réaliser mon objectif (inhibition).
Rappelons qu’inhiber des informations est une tâche difficile pour les TDAH. C’est pourquoi ils vont facilement se tourner de leur objectif principal par un autre élément de leur environnement. Par exemple, regarder Maxime en train de fouiller dans son casier et, finalement, lui proposer de l’aide ; faire son exercice, et répondre à la question que Paola posait à Léo, mais qu’il a entendue ; répondre au SMS qu’il vient de recevoir alors qu’il vous parle, …
Cet objectif est en lien direct avec notre motivation. En gestion mentale, nous parlons de mise en projet.
Le processus d’évaluation de l’utilité d’une information est le fruit d’une délibération rapide, et largement inconsciente la qualité de l’envahissement cérébral dépend de la clarté et la simplicité de l’objectif. Jean-Philippe LACHAUX.
Articles complémentaires
[1] La dopamine participe à un nombre important de fonctions du système nerveux central: thermorégulation, faim, soif, motricité, éveil, attention, cognition, mémoire, régulation de la pression artérielle, sécrétion de prolactine, sécrétion d’hormones de croissance, vision et olfaction.
[2] Rationalisation : fait de donner une explication logique pour justification.
[3] Feed-back : back veut dire retour et feed dans le sens encourager en anglais. Le feed-back appelé aussi rétroaction est une action qui revient sur sa propre cause. L’action forme donc une boucle entre cause et effet.
[4] Jean-Philippe Lachaux, auteur de « Le cerveau attentif » et « Le cerveau funambule »