Dyspraxie : Dysgraphie et passage au clavier

L’écriture est un geste complexe car c’est une activité motrice fixe, complexe, qui se construit dans la durée. La dysgraphie est un trouble durable et persistant dans l’acquisition ou l’exécution de l’écriture. C’est un trouble fonctionnel. Quand l’écriture n’est pas fonctionnel, quand la dysgraphie impose un passage au clavier ?

Un dyspraxique est toujours dysgraphique.

Le dysgraphique est handicapé par l’inefficacité de son geste.

* Geste lent qu’il est impossible d’accélérer

* Écriture illisible

* Production peu soignée.

Le dysgraphique n’est pas capable d’accélérer son geste d’écriture. Si on le force à accélérer, ses productions deviennent illisibles, son écriture devient chaotique, désordonnée. Je pourrai écrire, que ses productions deviennent encore plus illisibles lorsqu’il se sent pressé par le temps.

Le geste d’écriture ne s’automatise pas. Il reste au stade du graphisme (stade où l’on dessine les lettres). Ce geste d’écriture est souvent confondu avec son niveau de graphisme. On peut très bien dessiner et être dysgraphique.

La tenue du crayon et la formation des lettres peuvent être correcte. Il faut bien comprendre que l’enfant a un trouble et que cela est indépendant de sa bonne volonté.

La dysgraphie est un trouble persistant avec des retentissements :

–          Sur la forme des lettres

–          Leur tracé

–          Leur liaison (l’enfant n’écrit pas en « attaché, il lève son stylo plus que la moyenne)

Il s’en suit généralement une perte de confiance en soi, un manque d’estime de soi même et des comportements quelquefois qui peuvent devenir difficiles.

Pour écrire, il faut que non seulement faire un geste mais également avoir des capacités d’organisation spatiales (direction des traits, taille des caractères, retour à la ligne…). Les enfants dyspraxiques (et dyspraxiques visuo-spatiaux : ici) sont toujours dysgraphiques.

L’écriture est une praxie visuo-constructive ; autrement dit, elle associe tracé (praxie, pression sur le stylo, posture, prise en compte de l’environnement…) et repères spatiaux (mouvement de gauche à droite, rotation anti-horaire, …). L’écriture est donc le cœur de leur difficulté au niveau scolaire.

Les différentes stades de l’acquisition de l’écriture

Le stade pré-calligraphique :

Le stade pré-calligraphique démarre en CP, lorsque l’enfant a 6/7 ans. Pendant cette période, l’enfant va apprendre à respecter les normes de la calligraphie. Cela lui prend du temps car les exigences motrices sont importantes : les traits sont tremblants, retouchés, les liaisons entre les mots sont maladroites, les lettres montent ou descendent par rapport à la ligne…

Il faut généralement 2 ans à l’enfant pour franchir ce stade (de 2 à 4 ans).

Les dysgraphiques ne franchissent pas cette étape.

Stade calligraphique :

L’écriture s’équilibre, l’enfant commence à maîtriser son geste. Les difficultés motrices qu’il rencontrait dans le stade pré-calligraphie s’estompent jusqu’à s’éliminer complètement. L’écriture se lie, elle s’assouplie, elle devient plus régulière.

C’est à ce stade que l’enfant a « une jolie écriture »  comme on l’entend dire communément.

Il est même surprenant de voir l’écriture des enfants entre 10 et 12 ans : l’écriture est (pratiquement) acquise, il ne reste plus qu’à la perfectionner. On note alors la maîtrise du geste et un style commence à apparaître.

Les enfants dysgraphiques n’atteignent jamais ce stade.

 Stade post-calligraphique :

Il se situe après 10-12 ans. L’écriture est acquise dans son geste et dans sa vitesse.

L’équilibre (la jolie écriture) acquis précédemment est remis en cause. L’écriture devient le moyen de poser sa pensée, sa pensée va plus vite que sa main, l’écriture calligraphique purement devient trop lente. L’écriture se modifie alors pour s’adapter : c’est le début de la personnalisation des formes (mélange de script et de calligraphie). . L’écriture se personnalise.

Arriver à bien écrire

La question que l’on pourrait se poser est : est-ce qu’un dysgraphique peut arriver à écrire et à écrire bien ?

Dans certains cas oui et c’est généralement fruit de rééducation graphique (graphothérapeutes, psychomotriciens, …). L’écriture devient alors lisible, la vitesse s’améliore.

Le problème est que la dysgraphie est un trouble persistant et durable. Le dysgraphique restera donc toujours dysgraphique avec les problématiques collatérales engendrées par sa dysgraphie. Ce graphisme restera toujours coûteux sur le plan attentionnel. Le dysgraphique est alors constamment double tâche, il est donc en surcharge cognitive constante en milieu scolaire. Le faire écrire, c’est le sur-handicapé.

 

La surcharge cognitive : sur handicap

Le coût cognitif est le plus difficile à évaluer.

Généralement, il en ressort des difficultés à appliquer certaines règles de grammaire, le manque de ponctuation, une écriture qui se dégrade au fil de la rédaction de l’enfant.

L’enfant est donc absorbé par le geste d’écriture… au détriment des autres choses : écoute et compréhension notamment. L’enfant fatigue.

Cette fatigabilité est souvent mésestimée et surtout quand le geste d’écriture, au fils du temps ou grâce à des rééducations, s’est amélioré.

En imposant l’écriture manuelle, on impose de fait la double tâche et on aggrave la fatigue, la lenteur, on organise le déficit d’apprentissage

(Docteur Alain Pouhet – CHU de Poitiers)

Dysgraphie et passage au clavier

Le milieu scolaire est presque exclusivement sur l’écrit. En primaire, l’enfant va écrire pratiquement jusqu’à 6 heures par jour, au collège ou au lycée, jusqu’à 8 heures certains jours.

Vidéo :

L’informatique au secours des dyspraxiques

Il devient urgent alors de soulager l’écriture manuelle et de proposer un passage au clavier.

Le stylo n’est pas totalement exclu, l’enfant peut s’en servir pour dessiner, écrire des petits mots… car il est évident que l’écriture manuelle n’est pas intéressante pour les apprentissages.

Grâce à clavier, on enlève la surcharge cognitive, on redonne donc à cet enfant des capacités cognitives. Il peut alors écrire au clavier et écouter, réfléchir, et comprendre.

Le passage au clavier ne règle pas tout.

Il ne suffit pas de mettre un ordinateur dans les mains de l’enfant et d’attendre que ça aille mieux. Il va falloir lui apprendre :

–          à taper (apprentissage en clavier caché notamment pour les dyspraxiques visuo-spatiaux afin qu’ils ne s’épuisent pas à chercher les lettres)

–          à enregistrer ses documents

–          à utiliser les logiciels communs comme Word

–          à organiser l’enregistrement de ses documents (histoire/leçon/exercice)

–          à scanner, imprimer…

Cela va prendre du temps et c’est un ergothérapeute qui interviendra.

Dès le passage au clavier réalisé, il faut alors mettre en place rapidement des compléments (la frappe n’est pas tout dans le fait d’utiliser un ordinateur pour un dyspraxique) :

–          Logiciel de lecture (voir ici)

–          Logiciel de reconnaissance vocale, dictée vocale

–          Logiciel de géométrie…

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