Dyspraxie, dyslexie… : scolarité : parents, enseignants, instaurez le dialogue

 

L’enfant dyspraxique pourra suivre une scolarité normale :

 

–        S’il bénéficie d’adaptations, d’aménagements et de soutiens tout au long de son parcours scolaire.

–        Si ses enseignants comprennent qui la dyspraxie entraîne un retard graphique important et que ce retard sera toujours au premier plan ; et qu’il ne se réglera pas avec un entraînement et que le risque est de dégoûter l’enfant de l’écriture complètement.

–        Si ses enseignants comprennent la pollution d’un travail en double tâche et les conséquences attentionnelles et de fatigue qu’il entraîne.

–        Si l’oral est privilégié dans les apprentissages et également dans les contrôles ou évaluations.

–        Si les connaissances et le potentiel de l’enfant sont valorisées : langage, raisonnement, logique.

–        Si l’enfant comprend bien ses difficultés et qu’ils acceptent d’apprendre à les gérer (sans les dramatiser).

 

Il existe sur le premier point bien des difficultés et des embûches dans une adaptation tout au long du parcours scolaire. Les enseignants ne sont malheureusement pas formés sur les dys ; ils se retrouvent alors désarmés face à ces enfants qui présentent de très bonnes capacités verbales et une bonne culture générale et qui sont incapables de produire quoique ce soit au niveau écrit. Parce que ne l’oublions pas, le système scolaire français évalue à l’écrit les compétences et les acquisitions des enfants. Comment faire avec un enfant qui n’écrit pas ? L’interroger à l’oral, n’est pas l’avantager par rapport à ses camarades ? Et puis, il y a des jours où il y arrive alors quand il veut, en se forçant un peu, en faisant des efforts, il devrait pouvoir y arriver… Je passe le couplet sur les parents, la maman surtout qui est bien trop présente, trop étouffante, qui devrait le lâcher un peu …

 

Un certain nombre d’enseignant réagissent de la sorte par désinformation. Il faut aller alors prendre le temps d’expliquer, de faire passer des documents, de transmettre les coordonnées de rééducateurs…

Les associations ont souvent des petits livrets très explicatifs, vous pouvez donner l’adresse de sites sur Internet, proposer de prêter des livres…

 

Et puis, il a souvent l’amalgame entre la maturité intellectuelle et la maturité graphique, entre l’autonomie demandée en milieu scolaire et son niveau de maturité. Ce n’est pas parce que leurs cahiers sont sales que ce sont des gros bébés, ce n’est pas parce qu’ils n’arrivent pas à faire leur lacet, qu’ils n’arrivent pas à enfiler leur gant, qu’ils n’arrivent à fermer leur blouson, que leur casier est un bazar, qu’ils se mettent du crayon feutre de partout… qu’ils sont des petits. En les découvrant, vous apprendrez que l’on peut ne pas faire tout ça… parce qu’on est dyspraxique… et être mature quand même.

 

L’écriture est donc la difficulté majeure et celle qui nécessite un investissement de l’enseignant : photocopies, travail à l’écrit minimiser par des textes à trous…

Et puis, il y a des choses toutes simples aussi : quelle idée d’apprendre à un enfant dyspraxique de faire des majuscules en cursive ? Quel intérêt ?

Quel intérêt de lui faire copier un texte de 10/15 lignes pour vérifier s’il y aura des fautes ? On sait d’avance qu’il y aura des fautes de copie, et l’on sait aussi qu’il aura passé son énergie et son attention dans un exercice qui, de surcroît, est toxique pour lui. Pourquoi ne pas lui proposer simplement de rédiger 2/3 lignes sur un sujet…

 

L’arrivée de l’ordinateur en classe est aussi l’un des aménagements. Il faut alors apprendre à s’adapter enfant/enseignant avec ce nouvel outil : branchement, imprimante, enregistrement, clé usb… et/ou la place de l’AVS (Aide de Vie Scolaire) dans cette classe…

 

Il faut aussi penser à les valoriser dans leur compétence. Ces sont des enfants dont l’image d’eux même est souvent abîmée, ils ne s’estiment pas beaucoup, se croient « nul ». L’école, le regard des autres peuvent justement aider à améliorer cette image. Penser à valoriser ! Il faut aussi que l’enfant comprenne bien ce qu’il a et comment il fonctionne pour accepter les aides, pour demander de l’aide aussi… et ça ce n’est pas toujours facile. Personne, je pense, n’a envie d’être « différent », ni à 6 ans, ni à 10, ni à 15… on a simplement envie d’être un peu comme tout le monde.

 

Le Docteur Mazeau, spécialiste de la dyspraxie, dit que le niveau d’études d’un enfant dyspraxique n’était pas lié à son niveau de dyspraxie mais simplement au niveau des aménagements mis en place. Ce sont des enfants qui peuvent avec aménagements et soutien avoir une très belle scolarité.

 

Parents,

sachez aussi être indulgents face aux enseignants. Vous aussi par moment vous avez moins de patience, moins de compréhension… parce que vous êtes fatigués, parce que quelque chose vous tracasse… Donc pensez que ces enseignants sont aussi de « simples êtres humains ». Oui, c’est agaçant de voir son enfant en difficulté parce qu’un aménagement n’a pas été respecté. Apprenez donc à faire la part des choses, entre le fait systématique (qui lui est effectivement anormal) et l’oubli. Pensez donc à prendre du recul. Pensez que le dialogue doit s’établir dans l’intérêt de l’enfant donc plutôt que d’accuser, prenez l’option de ré-expliquer, ré-expliquer, ré-expliquer.

Il y a bien souvent de la souffrance chez les parents, souffrance liée aux incompréhensions passées, aux réflexions, aux remises en cause.

Outre le deuil de l’enfant « parfait », il y a un travail d’acceptation de cette différence, acceptation des aménagements, acceptation du handicap, de tolérance vis-à-vis des autres, de recul face aux incompréhensions. La colère est mauvaise conseillère. Un passé difficile ou douloureux peut devenir une force, de celle qui pousse à aller plus loin, de celle de l’énergie, de celle qui va en avant… En regardant le passé, vous n’êtes pas dans la vie actuelle, vous êtes éloignés de l’instant T, vous ne pouvez donc pas être dans l’aide. On ne peut être dans le passé et dans le présent, on ne peut être diviser en deux pour vivre les choses pleinement, la vie ne peut pas être une demi-vie. Ré-apprenez à faire confiance. Si ce cap est difficile, faites vous aider (psychologue, groupe de parole, forum de discussion…).

 

Votre enfant est dyspraxique, ce n’est pas de votre faute ; évitez donc de culpabiliser ; évitez aussi de justifier chacune de ses non-réussites par la dyspraxie. Lui aussi, il a le droit de ne pas réussir quelque chose, lui aussi il a le droit de ne pas avoir envie, lui aussi il a le droit de faire sa « tête de cochon » par moment, lui aussi  a le droit d’être un enfant ! Evitez donc de passer à la loupe et de décortiquer ses faits et gestes.
Décortiquer tous ses faits et gestes à la loupe, c’est d’ailleurs ce qui est trop souvent fait. Ce qui est permis ou admis pour un enfant « normal » devient rapidement sous la loupe du handicap, l’une des causes ou l’une des conséquences du handicap. Non ! N’importe quel enfant fatigué écrira moins vite, sera moins loquace en classe, oubliera des choses… donc lui aussi quand il sera fatigué, et quelque fois pas ni plus ni moins qu’un autre. Donc laissons leur avoir ces droits d’enfants. C’est souvent le tort de l’école de manière générale. Ne dramatisons pas, ne cherchons pas des problèmes là où n’y en a pas.

 

Enseignants,

Sachez prendre le temps de vous informer. Apprenez aussi que les enfants dyspraxiques ont aussi leur différence et ce qui marche avec l’un ne marchera peut être pas avec l’autre. Prenez le temps d’écouter les parents, ce qu’ils disent du quotidien, ce qu’ils demandent pour leur enfant, ils peuvent eux aussi avoir de bonnes idées ; pensez qu’ils vivent ce handicap au quotidien. N’hésitez pas à leur demander s’il faut l’aider à fermer son blouson ou s’il peut se débrouiller, ou si cette année un cycle « tennis » est prévu, comment il pourrait adapter, ont-ils des idées ? Ont-ils déjà lu ou entendu de parler de solutions ou adaptations dans telles ou telles situations ? Il n’y a pas de mauvaises questions, ni de questions qui vexent… il y a plus de « mauvais » dans les questions laissées sans réponse. Demandez, c’est aussi admettre que l’on ne connaît pas tout mais qu’on voudrait faire au mieux.

 

Pensez aussi que les parents se rendent compte que leur enfant peut donner du travail supplémentaire, demandez leur un coup de main : peut être pourront-ils surligner une ligne sur deux du texte qui sera vu le lendemain, peut être pourront-ils préparer d’avancer quelques feuilles pour poser une addition ?

 

Personne n’attend que vous vous transformiez en « Superman/woman ». L’attente est simplement que le handicap soit compris pour que les adaptations soient mises en place correctement. L’enfant a des handicaps invisibles de surcroît, il est déstabilisant.

Vous n’êtes pas seuls non plus, outre les parents, vous pouvez également vous tournez vers les rééducateurs – psychomotriciens, orthophonistes, orthoptiste, ergothérapeute – afin de recueillir leur avis et d’utiliser leur compétence. Vous pouvez les contacter en dehors des commissions éducatives ou mise en place des Projet de Scolarité Spéciale.

Malheureusement, le constat est que les médecins scolaires, qui pourraient être un soutien et un appui, sont encore trop peu informés, eux aussi, sur ce handicap. Ne nous décourageons, les différentes actions menées par les associations surtout font avancer les choses.

 

Cohérence :

Il me semble déjà important qu’un enfant sente la cohérence entre le discours de ses parents et celui de son enseignant, mais cette cohérence me semble capitale quand il s’agit d’un enfant en situation de handicap.

Ne critiquez pas l’enseignant de votre enfant devant lui. Les problèmes d’adultes se règlent entre adultes et sans les enfants.

Si vous critiquez l’enseignant de votre enfant ouvertement devant lui, vous lui faites perdre la confiance qu’il peut avoir en lui, il n’est plus en sécurité pour apprendre. Vous n’êtes pas obligé d’être d’accord tout le temps avec cet enseignant, vous pouvez aussi expliquer votre désaccord mais ne pas laisser supposer à l’enfant que c’est fait exprès, sciemment… Si réels problèmes, il y a discuter en ouvertement avec l’intéressé.

Enseignants aussi ne critiquez pas les parents, évitez aussi ce genre de conversation en cours de récréation avec vos collègues, les petites oreilles entendent bien souvent ce que l’on ne voudrait pas. Critiquer les parents, c’est déstabiliser l’enfant, c’est aussi potentiellement le mettre en colère et avoir des réactions que personne ne comprendra : refus affirmé par exemple.

 

Rappelons aussi qu’il y a des enseignants formidables qui s’investissent à 100%, voir 200%… Pensez à les remercier. On pense souvent à critiquer et l’on oublie trop souvent de féliciter et de remercier.

 

 

Donc dialogue, dialogue, dialogue

 

Je terminerai cette page sur une citation :

Tout groupe humain prend sa richesse dans la communication, l’entraide et la solidarité visant à un but commun : l’épanouissement de chacun dans le respect des différences.

Françoise Dolto.

 

 

 

 

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