Le harcèlement, c’est abuser

Si en parler est déjà un premier pas, juste en parler ne suffit pas. Il faut agir ! Le harcèlement (quelle qu’en soit sa forme : physique, verbale, sms, .) est un véritable fléau pour les jeunes qui le subissent.

Non, c’est pas vrai ! T’es pas sécurité au collège. Y’en a toujours un pour t’insulter ou t’humilier… et les autres, ça les fait rire
Bastien
13 ans

Des insultes sur tous les fronts « t’as pas d’ami », « t’es trop c.n », « t’es rien », « tu sers à rien », « sale grosse », « blondasse » remettent en cause constamment l’enfant. « Même en rasant les murs, ça continue ». (Émilie, 14 ans)

J’essayais d’être transparente. J’aurais voulu être invisible pour qu’ils me foutent la paix. En cours, je ne disais plus rien parce que dès que j’ouvrais la bouche, on se moquait ou me faisait des grimaces ou des gestes.
Emilie
14 ans

« Un jour, un de mes harceleurs m’a mis une grande tape dans le dos. J’ai eu super mal mais, pour ne pas perdre la face, j’ai rien dit. J’ai même rigolé. J’avais cher mal. »

Ne rien dire, essayer de faire face, tenter de garder une « dignité » ne rien laisser paraître ou le moins possible, c’est ce que ces jeunes m’avouent.

« Un jour, un prof a vu. Il m’a demandé si ça allait devant tout le monde. J’ai répondu que ça allait et j’ai dit qu’il n’y avait rien de grave. » révèle Jules (12 ans).

« Y’en a qui voit mais qui ne disent rien » relève immédiatement Corentin. « J’ai même un prof, une fois alors que je venais de lui dire que X n’arrêtait pas de m’insulter qui m’a dit que ce n’était pas grave et que je n’avais qu’à me défendre aussi. Après, je n’ai plus rien dit. »

« Tu dois te défendre, ne te laisse pas faire », c’est ce que m’a répondu mon père lorsque je lui ai dit qu’on m’embêtait..

Après, ils se taisent. Les adultes sensés les protéger ont été défaillants ou ont aggravé les choses. « Lorsque j’en ai parlé au CPE, mon harceleur a été convoqué. Après, ça a été pire. Il est rentré en classe et quelques minutes après que le professeur ait le dos tourné, il a passé son doigt sur sa gorge en me regardant puis il m’a dit « t’es mort ! ».

Pour ça, c’est abuser !

Régulièrement, Lauriane subit des moqueries dans sa classe. Elle se fait bousculer aussi. Elle a souvent peur quand elle arrive au lycée. Aujourd’hui, en classe, en plein cours, quelqu’un a pris quelque chose dans son sac. Lorsqu’elle s’en rend compte, elle va trouver les surveillants. Plusieurs élèves dans sa classe sont convoqués. L’élève coupable est démasqué, il est puni avec 2 heures de colle. Lauriane se dit qu’il va arrêter maintenant. Le lendemain, lorsqu’elle rentre en classe, les autres élèves défendent son harceleur : « aller se plaindre pour ça, c’est abuser quand même » lui dit-on.

La peur, aussi paradoxale que cela puisse paraître, pousse à ne rien dire.

Généralement, les jeunes vont en parler une fois à un professeur, à un surveillant, à leur parent… mais personne n’aura pris la mesure de ce qu’ils vivent dans leur quotidien.

 

« aller se plaindre pour ça, c’est abuser quand même » lui dit-on.

« Tu dois te défendre, ne te laisse pas faire », c’est ce que m’a répondu mon père lorsque je lui ai dit qu’on m’embêtait.

Après, ils se taisent. Les adultes sensés les protéger ont été défaillants ou ont aggravé les choses. « Lorsque j’en ai parlé au CPE, mon harceleur a été convoqué. Après, ça a été pire. Il est rentré en classe et quelques minutes après que le professeur ait le dos tourné, il a passé son doigt sur sa gorge en me regardant puis il m’a dit « t’es mort ! ».

 

Ce silence qui les tue de l’intérieur

« Je ne dis rien parce que ça sert à rien. » Les harcelés ne se plaignent que rarement, ils se taisent et quand vous les interrogez : « tout va bien ». Difficile alors de savoir !

Souvent, je lis que l’un des premiers signes est l’isolement. Pourtant quand les jeunes m’en parlent, ils disent avoir encore des copains, pas beaucoup, mais ils ne sont pas seuls. Je pense que le signe n’est pas l’isolement auquel on pense, mais plutôt que leurs copains ne sont pas fixes, ils changent régulièrement parce que justement, ils essayent de ne pas se retrouver seuls.

Le signe le plus flagrant et le point que je leur trouve en commun est qu’ils n’en parlent pas. Si les parents espèrent que leur enfant viendra les voir dans une telle situation, malheureusement, le constat est que c’est rarement le cas. Quand ils commencent à en parler, le harcèlement est souvent déjà bien installé et leur mal être déjà bien profond. Quand ils en parlent, soyez attentifs, parce que c’est le trop-plein qui s’exprime.

« Mes parents, ils sont sympas, mais ils peuvent rien faire », les jeunes ont l’impression que leur harceleur peut agir en tout impunité. Il est donc important pour tous les adultes de rester à l’écoute et de porter une grande vigilance à des faits qui peuvent paraître banals entre adolescents parce qu’il est sûr que ces mêmes jeunes sont fragilisés et qu’ils sont dans une grande souffrance.

Il convient alors de se poser des questions : un jeune qui se bat alors que c’est un élève généralement calme ? Un jeune qui ne parle plus en classe ? Un jeune qui change régulièrement de groupe de copains ? Et bien sûr, des résultats scolaires qui s’en ressentent parce qu’aller avec la trouille au ventre à l’école est loin d’être une bonne condition d’apprentissage.

Et les autres, ceux qui voient ?

Loi du silence, presque une omerta ! Ils savent, mais ne disent rien : ne pas être la balance.

Pourquoi t’as poukave !

J’ai pensé plusieurs fois à mourir parce que je ne voyais pas comment ça pouvait s’arrêter.
Léa
Juste 13 ans

Et surtout, une réelle peur que ça leur arrive. « Je vois, mais j’dis rien, j’ai trop peur qu’ils s’en prennent à moi après ». La réalité est alors camouflée par beaucoup de jeunes.

« Je vois, mais je dis rien, j’ai trop peur qu’ils s’en prennent à moi après »

« C’est pour s’amuser » ai-je entendu un jour. Pour amuser qui ? Peut-on vraiment rire quand c’est au détriment de quelqu’un ?

Quand ils ne voient plus d’issues…

« Plusieurs fois, j’ai rempli mon sac avec une corde… », une phrase effrayante à entendre pour n’importe quel adulte. Pourtant, c’est une triste réalité.

Le harcèlement ne s’arrête pas aux portes de l’établissement, il continue sur Facebook et par SMS. « Je recevais des sms de numéros que je ne connaissais pas, et même quand j’ai changé de numéro, ça a continué. J’avais l’impression qu’ils étaient partout et tout le temps-là ». Pas de répit, même au sein de la sphère familiale au sein de même de sa chambre, le harcèlement continue. Je pense que le phénomène est alors hautement aggravé par les portables et les réseaux sociaux.

De quoi avez-vous besoin que pour en parler ?

C’est la question que je pose aux jeunes, voici leurs réponses :

  • Avoir quelqu’un CPE, prof, ou autre adulte en qui on peut avoir confiance (mais vraiment confiance précisent-ils). Les jeunes demandent souvent de pouvoir en parler, mais ne veulent pas que leur nom soit cité, ils refusent les confrontations. Ils veulent se sentir protéger pour pouvoir parler.

 

  • Des réunions qui informent. Il faut savoir ce que c’est le harcèlement et ce que les harcelés subissent. Souvent, trop souvent, une insulte, une bousculade, une tape appuyée ne sont pas vues comme un harcèlement, les répétitions ne sont pas forcément toujours visibles par les mêmes individus. J’entends souvent dire que c’est une manière de « s’amuser », de « rigoler » et que ce n’est pas forcément très grave. Il serait donc intéressant de faire appel à l’empathie des jeunes : Et si, ça t’arrivait à toi ?

 

  • Informer les parents. Les jeunes pensent que les parents ne savent pas forcément que le harcèlement existe (on pense toujours que ça n’arrive qu’aux autres !). Si les parents le savent, ils n’ont pas forcément conscience de tout ce qu’il implique et des répercussions.

 

  • Ouvrir l’écoute au sein des établissements lorsque les parents viennent en parler et éviter de penser qu’ils sont en train de dramatiser des situations « normales ».

 

Pour bien comprendre l’ampleur du problème, je vous invite à lire le livre de Nora Fraisse : Marion, 13 ans pour toujours. Un livre touchant écrit par une maman dont la fille victime de harcèlement s’est pendue dans sa chambre. Émouvant, sans voyeurisme, un témoignage poignant sur une réalité difficile à admettre : Le harcèlement scolaire tue.

Marion, 13 ans pour toujours.

Nora Fraisse

Livre de Poche

 

Quelques ressources

Définition du harcèlement :

« Le harcèlement se définit comme une violence répétée qui peut être verbale, physique ou psychologique. Cette violence se retrouve aussi au sein de l’école. Elle est le fait d’un ou de plusieurs élèves à l’encontre d’une victime qui ne peut se défendre.

Lorsqu’un enfant est insulté, menacé, battu, bousculé ou reçoit des messages injurieux à répétition, on parle donc de harcèlement. « 

Définition du harcèlement :

« Le harcèlement se définit comme une violence répétée qui peut être verbale, physique ou psychologique. Cette violence se retrouve aussi au sein de l’école. Elle est le fait d’un ou de plusieurs élèves à l’encontre d’une victime qui ne peut se défendre.

Lorsqu’un enfant est insulté, menacé, battu, bousculé ou reçoit des messages injurieux à répétition, on parle donc de harcèlement. « 

#nonauharcelement

Trouver de l’aide :

♦ Un numéro de téléphone : 3020 que vous soyez victime, témoin, adulte…

♦  Net Ecoute : numéro d’écoute contre le cyber harcèlement : 0800 200 000

Gratuit, anonyme et confidentiel Net Ecoute est le numéro vert national spécialisé dans les problématiques que rencontrent les enfants et les ados dans leurs pratiques numériques, et notamment le cyber-harcèlement. Notre équipe d’écoutants est disponible du lundi au vendredi, de 9h00 à 20H00 et le samedi de 9h00 à 18h00, pour aider les jeunes mais aussi conseiller les parents et les professionnels concernés.

♦  Association HUGO 

Une association lyonnaise loi 1901 d’intérêt général, créée en janvier 2018.

♦  Protocole de traitement des situations de harcèlement dans les écoles et les établissements publics locaux d’enseignement – Eduscol – Ministère de l’Education nationale

  • Article de l’APEL : que faire face au harcèlement ?
  • Le site « debout » crée par Paul George, victime de harcèlement.

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